Le léger vent soulevait doucement mes cheveux, les emmêlant ainsi à sa façon. La chaleur était supportable, bien que je sentais mon nouveau corps s'adapter à la température, la sueur perlait de mon front, de mon dos recouvert d'un fin t-shirt vert usé et sur ma nuque bouillante. Le sol poussiéreux et desséché il y avait mes empreintes de pas, mes chaussures militaires ne passaient pas inaperçu aux yeux de la nature. Je me sentais bien ici, la température pourrait baisser un petit peu plus et cela serait vraiment le paradis. On m'avait dit autant de bien que de mal de cette planète, de sa civilisation, mais se dresse devant moi une chose unique, magnifique. Le sol prenait fin, un canyon me souffla mon cerveau, se tenait à mes pieds. Les couleurs rougeoyantes du paysage m'agressaient les yeux, mais c'était réellement sublime, des poussières de sable volaient dans la gorge du canyon, au dessus du vide. Je m'assis au bord de la falaise, je me sentais libre j'avais l'impression de vivre. Mec, oublie pas qu'avec moi tu n'es pas libre ! Je levais mes yeux au ciel, excisai un sourire sur mon visage humide, mon humain avait terminé sa sieste.

J'avais quitté la ville il y a peu, deux petites heures, afin de m'évader un peu de mon quotidien. Je regardais des films humains chez moi, j'appréciai vraiment cet art, je lisais des livres, mais je m'ennuyais. Je travaillai quelques fois, je gardais des enfants, je partais en voyage avec eux pendant une semaine entière parfois. Mon humain respectait ces instants, il n'intervenait jamais, peut-être qu'il trouvait mon travail bon, ou tellement ennuyant je ne sais pas trop, dans tous les cas il ne me parlait pas. Je ne pouvais pas rester indéfiniment chez moi à regarder des images qui défilent sous mes yeux, j'avais besoin de marcher, exploser ce corps et repousser ses limites. J'avais donc décidé de partir en excursion au canyon, je savais qu'il était interdit de partir de la ville sans informer quelqu'un mais le côté rebelle de mon humain était tellement puissant qu'il m'affectait, et j'aimai ça.

Bois de l'eau ! Tu vas nous tuer ! Je n'écoutais mon hôte qui semblait se manifester subitement. Il avait soif? Pas moi. J'étais plus résistant que lui apparemment, et il allait devoir se plier à mes envies ou s'endormir à jamais. Je posai ma main sur le sol rocailleux et caressai la roche qui m'éraflait les doigts. Le corps humain est tellement sensible, le sentais la roche, l'odeur du sable, la pression de la chaleur, tout mes sens étaient en éveil. Exposé en plein soleil la chaleur devenait vraiment assommante, je commençai à ressentir un mal être, tout mon corps était humide. Rentre immédiatement ! Tais-toi, va dormir, pensai-je en m'adressant à l'humain. Je levai mes genoux, ce n'était pas moi mais l'humain qui agissait contre mon gré. Je repris le contrôle sur lui et décidai de me fermer, j'entendais sa voix dans ma tête mais ne prêtais pas attention au sens de ses mots. Je regardai le soleil, le paysage, cette splendeur. Pim, pim, pim. Quel est cet étrange bruit? Des chaussures à talons patate ! Mon cerveau m'envoya l'image, un souvenir peut-être, de petites chaussures noires, avec de hauts talons qui tapaient le sol en produisant une mélodie. Je me retournai, une femme se dressait devant moi...

La femme qui me faisait face était plutôt petite, elle atteignait la taille moyenne avec ses hauts talons vertigineux. De longs cheveux blonds encadraient son visage. Elle semblait m'étudier, me fixant de ses yeux bleus clairs, c'était une Âme, et certainement même une Traqueuse. Bravo, j'espère pour toi que cette fois tu as prévenu que tu sortais sinon on va encore avoir des ennuis. Prévenu ? Non, non, moi je ne préviens pas, j'ai quand même le droit de bouger de chez moi. Sur cette planète les règles étaient très stricts, et le problème c'est que parfois je ne les suivaient pas toujours à la lettre. Je me levai d'un bond, dominant d'une bonne tête la jeune femme qui avait croisé ses bras sur sa poitrine comme si elle allait me faire passer un interrogatoire.

« Bonjour, monsieur. Vous vous êtes perdu ? Je peux vous aider, peut-être ? »

Moi, perdu ? Tu m'étonnes, la bonne blague. J'adressai un grand sourire à l'Âme qui se tenait face à moi, je cherchais mentalement une manière polie de lui dire qu'elle ne pouvait pas m'aider et qu'il ne fallait pas qu'elle me ramène à Tucson. Je sentais que mon humain était dégouté à la vue de la Traqueuse, comme il l'était à chaque fois, il ne pouvait pas les encadrer et parfois j'arrivais à le comprendre. Je me demandais bien ce qu'elle faisait seule ici, certes elle devait se poser la même question pour moi.

« Bonjour ! Non, merci, c'est très gentil de votre part mais je ne suis pas perdu, je regardais juste le paysage. »

Je chiale, tu crois vraiment qu'elle va nous laisser tranquille si tu lui parles comme si tu étais un bisounours ? Mais tais-toi un peu, je suis poli voilà tout, j'imagine que toi tu ne connais pas ce mot. J'aurais bien levé mes yeux au ciel, parfois cet humain m'énerve vraiment, comme tous les hôtes il devrait fermer sa grande bouche mais il semble particulièrement tenace. Je conservai mon sourire, j'essayais d'être le plus normal possible, je suis normal hein, mais à la base je ne suis pas vraiment censé être ici... J'aurai presque voulu lui retourner la question mais je savais qu'elle était ici pour chasser des humains, ils courent partout, ils sont difficiles à attraper. Elle certainement mieux à faire que de m'interroger, j'attendais donc qu'elle tourne les talons bien qu'elle semblait particulièrement déterminée à me tenir la jambe pendant un certain temps.